C’est un type de fût, ou futaille, en bois de forme et de capacité variables selon les régions. Il permet l’élevage du vin.
Histoire du tonneau : L’amphore est, dans l’Antiquité, le récipient le plus utilisé pour le transport de produits de base : le vin, l’huile d’olive, la bière (zythum et zythogala) et les sauces de poissons (de type garum).
Le cintrage du bois à chaud est connu très tôt des Celtes, des Phéniciens et des Égyptiens, notamment dans la fabrication des bateaux.
Hérodote mentionne au Ve siècle avant J.-C. un commerce de vin par voie maritime, entre l’Arménie et la Mésopotamie, utilisant des tonneaux en bois de palmier. Le palmier est un bois difficile à cintrer, aussi différents bois sont testés pour fabriquer des tonneaux. Le tonneau est souvent considéré comme une invention gauloise qui leur servait notamment à conserver la cervoise et à transporter des liquides comme de l’eau potable. Néanmoins, cette invention gauloise est attribuée par erreur par Pline l’Ancien, les tout premiers tonneaux étant fabriqués dans la région des Rhètes (les actuels Grisons en Suisse) que Pline confond avec les Gaulois, ils sont alors désignés sous le terme « cupa ».
Les plus anciennes traces iconographiques de tonneaux proviennent en fait d’Étrurie au VIe siècle avant notre ère, l’hypothèse de la paternité celte est aussi évoquée. Jules César mentionne son utilisation au cours d’un siège dans son Commentaires sur la Guerre des Gaules, la conquête romaine diffusant le tonneau gaulois dans l’Empire romain. Les Gaulois perfectionnent par la suite sa technique de fabrication et exportent le savoir-faire de grands centres de tonnellerie, utilisant principalement le tonneau (d’abord majoritairement en conifères) comme réutilisation en cuvelage de liquides, salaisons de poissons.
La substitution progressive du tonneau (plus léger, roulable ou transportable à dos d’animal) aux amphores (lourdes, fragiles, peu empilables) se répand dans la partie septentrionale de l’Empire romain à partir du IIe siècle où il est principalement utilisé pour la conservation et le transport du vin qui se faisaient jusqu’alors dans des amphores grecques. Son emploi se généralise à compter du IIIe siècle. C’est une reconnaissance de cet objet utilitaire et une révolution pour le marché du vin de l’Antiquité, probablement même un facteur de développement du marché du vin.
Souvent fabriqués en bois de Cây sồi, les tonneaux peuvent être aussi en châtaignier et en acacia. Le foret est une pointe d’acier qui sert à percer le bois pour goûter le vin en cours de vieillissement ; le fausset – ou fosses – est une cheville de bois (souvent en noisetier) qui sert à reboucher le trou du foret. Enfin, la cannelle est un robinet de bois, fixé au tonneau pour permettre l’écoulement du vin ; on l’appelle « chantepleure » en Anjou et en Bourgogne.
Les premières corporations de bateliers gallo-romaines les utilisent le long des fleuves navigables à bord de lourdes barques, car ils sont plus maniables que les fragiles amphores romaines, et donnent moins de goût que les outres en peau d’ovins ou de bovins.
Sa diffusion se fait tout au long du Moyen Âge, du nord au sud de l’Europe, par le biais des rivières, des fleuves, des mers et des océans, des ports, des routes, des foires, des marchés régionaux ou internationaux (Foires de Champagne). Il accompagne l’essor des premières grandes villes marchandes italiennes, flamandes, allemandes (La Hanse), anglaises (Bristol) ou françaises (La Rochelle, Bordeaux, Nantes), puis se diffuse à d’autres continents, surtout à partir des Grandes découvertes et de l’accélération de la mondialisation, des conquêtes et du commerce transatlantique.
Vers 1650, ce récipient fut associé à une expérience célèbre : le crève-tonneau. Il permit d’écrire le Principe de Pascal sur la mécanique des fluides.
Héritée des anciennes mesures médiévales, une grande disparité jointe à un chevauchement des volumes sous des dénominations différentes ne fut pas abolie sous la Révolution. Elle perdura jusqu’au milieu du XIXe siècle. Les négociants en vin de Paris, par l’intermédiaire de leur hebdomadaire nouvellement créé, Le Journal de Bercy et de l’Entrepôt. Le Moniteur Vinicole, lancèrent une pétition à l’adresse de Napoléon III, qui fut publiée le 6 octobre 1856. Au nom des principaux propriétaires et négociants de France, ils demandaient à l’empereur « l’unité des mesures de jaugeage des vins » et l’application du système métrique sur les contenants dont les volumes variaient « d’une contrée viticole à l’autre et souvent dans un même département ». Les pétitionnaires expliquaient qu’ils s’estimaient frustrés, chaque année, d’environ 1 000 000 d’hectolitres et demandaient instamment l’application des textes de lois de 1793, 1812 et 1837.
Durant la Première Guerre mondiale, dès octobre 1914, l’Intendance afin d’améliorer la vie des poilus dans les tranchées ajouta une ration de vin à l’ordinaire des troupes. Tout soldat reçut quotidiennement un quart de vin. Cette ration fut reconnue insuffisante et doublée par le Parlement, en janvier 1916. Ce demi-litre fut augmenté à partir de janvier 1918, et la ration passa à trois quarts de litre par jour. C’est dire l’importance considérable que prit le tonneau pour le transport du vin jusqu’au front.
Or « si le vin ne manque pas, en revanche les tonneaux manquent au vin. Depuis le début des hostilités, la tonnellerie ne fabrique plus, et par contre les besoins qu’elle doit satisfaire ont sans cesse grandi… Si tous revenaient à leur point de départ ! Beaucoup, hélas! Une fois vides, s’égarent sur la route du retour ; beaucoup d’autres reviennent, glorieux blessés de guerre, aux douves cassées, brisques coûteuses… Des remèdes ont été cherchés : faute de bois de chêne, on a eu recours au bois du châtaignier dont l’usure sera plus rapide. Malgré tous ces palliatifs, l’Intendance pousse un cri d’alarme: « Si vous voulez du vin, ménagez les tonneaux », clame-t-elle désespérément ».
On recommande le vieillissement en fûts de nombreux rượu vang đỏ (Pauillac ou Chianti Classico par exemple) ou blancs (Bourgogne ou Chardonnay américain par exemple), de certains vins mutés ou spiritueux connus mondialement (rượu sherry, sherrys, whiskeys, cognacs, rượu mùi, rums, Calvados) et de certaines bières (lambic, kriek, faro, bière rouge). Cette caractéristique est utilisée aussi pour fabriquer en Italie le vinaigre balsamique.
Jusqu’au milieu du XXe siècle, les tonneaux étaient le mode de colisage le plus pratique pour le transport ou de stockage, bien que n’étant pas le plus économique. Toutes sortes de produits en vrac, des clous aux pièces d’or, y étaient stockés. Les sacs et les caisses étaient meilleur marché, mais ils n’étaient pas aussi robustes et ils étaient plus difficiles à manipuler à poids égal. En effet, un tonneau roule évidemment très bien comme un cylindre, mais s’il est debout, tout manœuvre adroit réussit à le déplacer sans effort en le roulant incliné, en équilibre sur son arête. Ainsi, des concours d’adresse se déroulaient autrefois aux halles où les livreurs devaient courir avec un tonneau. Les tonneaux perdirent peu à peu leur importance au cours du XXe siècle, en raison de l’apparition de la palettisation et de la conteneurisation de la chaîne logistique.
À la fin du XXe siècle, de tonneaux en tôle d’acier sont toujours utilisés pour le stockage et le transport de nombreux liquides, tels que l’huile, le pétrole et les déchets dangereux. La bière sous pression pour les bars est toujours livrée en tonneaux métalliques, soit en aluminium soudé (deux parties embouties ou en métal repoussé), soit en trois parties serties à la façon de certaines boîtes de conserve.
Au début des années 1980, une mode du goût du bois a créé une demande très forte vers des vins boisés. De nombreuses régions productrices ont créé des chais à futailles de bois pour fournir le marché. Aujourd’hui, le marché a trouvé un certain équilibre entre les vins boisés et non-boisés.
De nos jours, l’entonnage s’est maintenu dans le vocabulaire vinicole, il concerne l’action de remplir un fut de vin, mais peut également être étendu à celui des cuves, ou des camions-citernes et de leurs remorques.
De nombreux vignobles (France, États-Unis, Chili, Italie, Espagne, Argentine, …) mettent leur vin en tonneau pour la vinification, ou pour l’élevage. Cette pratique est coûteuse par suite du prix de la futaille, et par suite de l’absorption du vin par le bois du fût et de l’évaporation.
Fabrication du tonneau : La fabrication entièrement manuelle ne se retrouve aujourd’hui que dans l’artisanat, de nos jours le métier de tonnelier est toujours exercé mais de nombreuses machines l’assistent, notamment pour les travaux de force et fastidieux (rabotage, serrage…). Les réparations doivent encore aujourd’hui être effectuées manuellement.
Leur confection nécessite des troncs d’arbre, généralement de chêne, à l’état de billes qui sont fendus en quartiers. Ces derniers sont débités en merrains. Cintrés à chaud; ils forment les douelles. Celles-ci sont creusées d’une rainure appelée jable dans laquelle vont aller s’encastrer les fonds dénommés contres et chanteaux. Des cercles, en bois ou en feuillard maintiennent le tonneau qui peut être déplacé par roulage ou balancement.
Sa composition et son mode de fabrication, notamment la chauffe, ont une grande influence sur le goût du vin qui y sera élevé.
Le tonneau fini, vide, a un poids proche de 45 kg, pour une taille d’environ 90 centimètres de long et un diamètre de 60 à 70 centimètres.
Contenance des tonneaux : L’histoire et la géographie des régions viticoles ont donné naissance à une grande diversité de contenances. Les capacités varient ainsi en fonction de l’utilisation, de quelques dizaines à plusieurs centaines de litres. Ces volumes sont cependant standardisés à l’intérieure même des régions, mais on retrouve des dénominations différentes, et des variations de volumes d’une région à l’autre.
Les capacités les plus utilisées de nos jours sont de 228 litres pour le fût d’origine bourguignonne, et 225 litres pour la barrique d’origine bordelaise.
Le tonneau est utilisé comme unité de transaction financière, grâce à la régularité de sa manufacture. Quand elle est en cours d’utilisation, elle prend en Bourgogne le nom de "pièce".
Autres dénominations :
– Barrique : Une barrique (de l’occitan gascon thùng), se distingue du tonneau par sa fabrication plus légère et sa durée de vie de quelques années.
Elle peut servir en plus de l’usage œnologique pour vieillir le vin, à stocker, conserver, expédier des liquides (bières, huiles, eaux-de-vie) et des marchandises solides (morue, sucre, etc.).
– Tonnelet : Un tonnelet est un petit tonneau.
– Fût : Un fût est un tonneau de 30 à 350 l.
– Pièce : Une pièce est un récipient vinaire servant essentiellement à la conservation et au vieillissement du vin, elle prend cette appellation en général lorsqu’elle est pleine uniquement.
– Baril : Un baril est un petit tonneau de contenance variable selon sa destination, utilisé pour le transport et la conservation de liquides, d’aliments ou de matières sèches (définition du CNRTL) ; ce peut être aussi un emballage cartonné (pour les lessives, par exemple) ; en métrologie, c’est l’unité de volume utilisée pour le pétrole.
– Foudre : Un foudre est un tonneau grande capacité, pouvant aller de quelques centaines à plusieurs milliers de litres.
En France, les tonneaux se répartissent ainsi :
– en Alsace, le foudre de 1000 litres environ (pour la conservation et la vente du vin) et Paume de 114 litres (pour l’expédition) ;
– dans le Beaujolais, la pièce de 216 litres, la feuillette (demi-pièce) et le quartaut (quart de pièce) ;
– dans le Bordelais, la barrique (fût le plus courant, de 225 litres) et le tonneau (900 litres, ou 96 caisses de 12 bouteilles), ainsi que la demi-barrique, ou feuillette, et le quartaut (quart de barrique) ;
– en Bourgogne, la pièce de 228 litres (24 caisses de 12 bouteilles), la queue (456 litres env.), la feuillette (demi-pièce) et le quartaut (quart de pièce) ;
– dans le Chablis, la feuillette de 132 litres ;
– en Champagne, la queue de 216 litres et la demi-queue ;
– en Anjou, en Saumurois et en Vouvray, la pièce de 220 à 225 litres ;
– dans le Mâconnais, la pièce de 215 litres ;
– dans le Midi, le demi-muid de 600 à 700 litres.
Dans d’autres pays, on utilise surtout la pipe (418 litres à Madère, 522 litres à Porto et à Tarragone) ; le puncheon à rhum, de contenance très variable ; le buts de 490 litres environ, pour le xérès et le whisky écossais ; le barre de 182 litres environ, pour le whisky américain.
Citation de l’écrivain gastronomique Regis Carisey : « Ce vin fut longtemps dans ce même tonneau ».
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